
Focus The One – BZT22
BZT22
De la bombe au naturel!

BZT22, un nom qui sonne bon le graff de rue !
Mais détrompez-vous, Alain Bezotte de son vrai nom, revendique haut et fort son statut de peintre d’atelier. Artiste au grand cœur, généreux par nature, il sait continuellement donner de sa personne en offrant ce qu’il a de mieux : son temps et son talent.
J’ai d’ailleurs pu en faire l’heureuse expérience lors d’une journée au cœur de son petit coin de paradis, à 1h30 de Paris.
Autodidacte, c’est avec fierté qu’il nous raconte son parcours où l’art ne l’a jamais réellement quitté.
Né en 1979 en Normandie, BZT22 a très vite compris que l’art occuperait une place importante dans sa vie.
N’ayant pas voulu faire les Beaux-arts par peur de perdre sa liberté de créer, il a toutefois passé un CAP Sérigraphie.
Cette formation lui valut quelques années plus tard de passer maître d’une technique très similaire, l’art du pochoir. Elle lui permettait à ces débuts de réaliser des peintures dans la rue de manière efficace, offrant au spectateur un rendu de qualité, poussant dans le détail, ce que le graff ne lui permettait pas de faire. C’était pour lui un bon compromis.
Connu pour son travail au pochoir, BZT22 touche pourtant à tout !
C’est ainsi que j’ai pu découvrir qu’il était également un talentueux illustrateur, sculpteur et bédéiste !
Mais comment fait-il, me direz-vous !
Il se peut que ce soit dans le besoin de se renouveler et d’apprendre de nouvelles techniques, car BZT22 se remet régulièrement en question et ne vit jamais sur ses acquis.
Il attache donc beaucoup d’importance aux collaborations qui sont à ses yeux l’occasion de partages humains dans un état d’esprit convivial.
BZT22 semble s’épanouir au sein d’une grande famille d’artistes, aux valeurs humanistes et sociales.

Artiste engagé, il participe donc régulièrement à des événements par le biais d’associations comme Emmaüs, le Toucan pistache » œuvrant pour l’insertion grâce à l’art et la culture dans les hôpitaux, les établissements pénitentiaires… Et plus récemment, en 2018 avec l’association « Donnez-leur des ailes » afin de venir en aide aux orphelins népalais.
Ce voyage a d’ailleurs marqué l’artiste qui souhaite y retourner prochainement.
Enfin lorsque j’ai demandé à BZT22 pourquoi se sentait-il artiste, il m’a tout simplement répondu que c’était un bien grand mot pour lui. Son art, c’est sa vie, son oxygène.
Alors un plan de carrière, très peu pour lui ! Alain le dit si bien : « J’aime peindre, c’est tout. »
Galerie Photo
PassCard One Shoot :
Nom : BTZ22
WEB: https://www.urbacolors.com/fr/artist/bzt22https://www.artsper.com/fr/artistes-contemporains/france/53906/bzt22
Insta : @bzt.22
Facebook : BZT22 page artiste
Questions générales
1/ Quel fut votre parcours professionnel et artistique ? Ont-ils été liés ?
Mon parcours est assez atypique. Je n’ai jamais fait d’école d’art, je suis autodidacte. Ma seule formation artistique est un CAP sérigraphie. Depuis tout petit je dessine. Je voulais faire les Beaux-arts à Caen mais j’avais cette impression que j’allais perdre ma créativité à être formaté. Avec le temps, je me rends compte que l’apprentissage de technique aurait été malgré tout intéressant. Apprendre par moi-même m’a donc pris plus de temps. Mes débuts professionnels se sont faits en poissonnerie, rien à voir ! (Sourire) Cependant, je profitais de ce travail pour créer des sculptures de glace et théâtraliser les étals. A cette époque, je ne me sentais pas légitime pour me considérer comme « artiste » et en vivre, je ne me sentais pas à la hauteur. Puis, avec le temps, je me suis rendu compte qu’il fallait tenter sa chance et faire ce qui m’avait toujours passionné. J’ai donc repris la peinture, j’ai tout quitté et je suis très heureux à ce jour. Je ne regrette rien. Ma passion je l’ai dans le ventre, et je sais que je mourrai avec elle.
2/ Expliquez-nous votre processus de création.
Je marche au coup de cœur et à l’émotion. Mes émotions montent, descendent et influencent fortement ma peinture. Cela dépend aussi de ce que je peux écouter. Beaucoup de facteurs entrent en jeu. Il faut savoir que je peins pour moi avant tout, je ne peins pas pour les autres.
Questions incontournables
3/ Selon vous, vous considérez-vous comme « artiste » ?
Le mot « artiste » est un grand mot, je ne me considère pas comme un artiste. Tout le monde est artiste, même les enfants sont des artistes. On a tous cette capacité. La question est en effet compliquée. A quel moment se considère-t-on comme artiste ? Si on regarde, la nature peut être considérée comme artiste, elle nous offre tellement de belles choses ! Moi, je peins (rire). Je ne me sens pas revêtir l’étiquette d’artiste.
4/ Citez-moi trois qualités chez vous qui se reflètent à travers votre travail artistique.
L’exigence, la rigueur… et la boulimie face au travail. Je suis capable de travailler durant des heures à en oublier de manger ou boire. Ça peut être perçu comme un défaut mais je la considère comme qualité car cela me permet de progresser et d’avancer.
5/ Quel est votre meilleur souvenir artistique ? Une mésaventure ?
Sans hésitation mon voyage au Népal. Je fais partie d’une association, « Donnez-leur des ailes », avec laquelle je suis parti au Népal pour aider un orphelinat et ça a bouleversé ma vie. Ce partage avec les enfants… ce pays est complètement fou artistiquement et humainement.
Ma mésaventure s’est faite là-bas également. J’ai pris la route la plus dangereuse du monde : un ravin de 500 mètres pendant 6 heures, le rétro qui frotte la falaise sur le côté, moi qui ai en plus le vertige… (sourire) Mais le fait de peindre ensuite avec les enfants, cette joie qu’ils ont à partager… furent les meilleurs moments de toute ma vie après la naissance de mes enfants. Cela m’a énormément marqué.
6/ Quelle est votre « claque » artistique ?!
Ce serait pour moi l’artiste Inti. J’adore son travail, il fait des fresques murales extraordinaires.
7/ Quels sont vos projets artistiques pour la fin 2021 et l’année 2022 ?
Pour fin 2021 il y a une grosse collaboration avec un ami photographe qui a l’un des plus gros studios photo dans le nord de Paris. C’est un artiste qui met l’accent sur la qualité de l’image. Cette aventure commencera en fin d’année et durera certainement longtemps avec beaucoup d’autres artistes. Et 2022 ce sera de nouveau le Népal si les conditions le permettent. On devait partir cette année et cela ne s’est pas fait à cause de la pandémie. En ce moment on met donc en place des actions comme des expositions afin de pouvoir récolter des fonds qui nous serviront à aider ses jeunes Népalais orphelins. Notre objectif une fois sur place : pouvoir leur payer l’école, leur tenue, les cartables, leur permettre de développer l’informatique avec l’achat d’ordinateurs…
6/ Un rêve que vous souhaiteriez réaliser en tant que peintre ?
Au Népal, au pied de l’Annapurna, lorsque nous sommes allés au village de Tatopani, il y a un énorme et magnifique rocher d’environ 50 mètres de haut que j’aimerais peindre avec les enfants de l’orphelinat. Ce projet me tient à cœur et j’espère pouvoir le réaliser prochainement.
Questions spécifiques à l’artiste
7/ Vous habitez un endroit magnifique. Est-ce une source d’inspiration pour ton travail de création ?
Oui, bien sûr. Ce lieu m’apaise. Je suis déconnecté de tout ici.
8/ Quel plaisir éprouvez-vous dans la peinture ?
C’est ce que je préfère le plus, c’est un moment qui n’appartient qu’à moi. Je peux faire ce que je veux. Je me sens déconnecté de tout. Je ne pense plus à rien, je suis dans mon monde, personne ne peut m’atteindre à ce moment-là. C’est un sentiment de liberté totale. J’aime cette citation qui dit « vivre libre ou mourir ». J’en ai besoin.
9/ Avez-vous déjà testé d’autres domaines artistiques ?
J’adore la musique. Elle est d’ailleurs essentielle à ma peinture même si je ne sais pas en faire. J’ai fait un peu de photo, du théâtre lorsque j’étais plus jeune. Mais je touche à tout : sculpture, BD, dessin… Tout m’intéresse, même si ce qui me parle le plus est la peinture.
10/ Vous avez beaucoup voyagé. Ces voyages étaient-ils l’occasion de créer, ou voyagiez-vous pour le travail ?
Au départ l’objectif n’était pas de peindre ou de créer quoi que ce soit, même si on emporte toujours dans ses valises de quoi peindre. C’est venu une fois sur place. On rencontre des artistes locaux, on discute, on nous propose des collaborations ou certains festivals. Par exemple, lors de mon voyage au Népal, j’ai pu rencontrer l’artiste tatoueur Krishna qui a énormément de talent. A partir de 2022, nous partirons cette fois-ci avec de vrais projets artistiques, au Népal, mais également en Thaïlande, Philippines, Vietnam… si tout se passe bien !
11/ Vous faites partie de ces peintres qui travaillent au pochoir : comment en êtes-vous arrivé là ? Avez-vous tenté d’autres styles avant cela ? Racontez-nous votre cheminement.
Le pochoir est venu grâce à la sérigraphie, tout simplement. Les deux techniques sont similaires dans le concept : un pochoir par couleur en comparaison avec un écran par couleur pour la sérigraphie. Cette technique était pour moi aussi très intéressante dans la rue pour avoir un rendu efficace. Le résultat prend forme assez rapidement. La préparation des pochoirs, très longue, se fait en amont à l’atelier, mais la mise en couleur en rue est assez rapide. Je pouvais donc obtenir un portrait (Il faut savoir que j’adore les portraits !) de qualité très rapidement en allant dans le détail, que je trouve difficile d’obtenir en graffiti/vandal. Le pochoir était donc le bon compromis. On me connaît essentiellement pour mon travail au pochoir mais il faut savoir que je fais énormément d’illustrations. On a d’ailleurs monté un collectif avec plusieurs bédéistes, on a créé quelques fanzines notamment dans des cages d’escaliers.
12/ Vous êtes capable de travailler tous les formats. Quel a été votre plus grand projet et à l’inverse le plus petit en taille ?
Le plus grand fut dans un festival. Un grand pochoir de quasiment 5 mètres. Travail qui a nécessité deux mois de préparation en découpe, pour 24 pochoirs au total. Je voulais rendre hommage à mon ami Mike qui s’occupe de l’orphelinat depuis 18 ans. Le plus petit format au pochoir à l’inverse est un petit portrait de la taille d’un paquet de cigarettes. (Sourire)
13/ Que préférez-vous justement : le grand format ? le petit ?
Dur dilemme de choisir entre les deux ! Le petit permet un travail de précision, très fin, que j’aime. Mais le grand format me permet de développer davantage en rentrant dans les détails… Si je devais obligatoirement faire un choix, le grand format me procure malgré tout plus de plaisir et de satisfaction.
14/ Aujourd’hui, pas mal de graffeurs se lancent dans le graff sur toile, afin d’exposer leur travail dans des galeries. Vous arrive-t-il de peindre sur toile, et si oui dans quelles circonstances ?
Je me considère plus comme un artiste peintre d’atelier. Je passe beaucoup plus de temps dans mon atelier à peindre qu’à l’extérieur. J’ai donc déjà fait de la galerie, mais pour ma part je préfère les galeries alternatives car j’ai toujours du mal avec le côté économique des galeristes. Cependant je trouve bien d’avoir pu démocratiser le graff, c’est une très bonne chose. De mon côté, je préfère verser le pourcentage à des associations.
15/ Travaillez-vous selon vos envies ou êtes-vous demandé pour des commandes particulières ?
Je ne fais quasiment plus de commande car je ne m’y retrouve pas. Cela peut tout de même m’arriver par envie. Je ne ferai plus rien par obligation, même pour une question d’argent. Du moins si je peux l’éviter, cela m’ira parfaitement bien.
16/ Quelle partie de votre travail préférez-vous ?
La réalisation. La mise en peinture est le moment où je prends mon pied ! Je me vide totalement émotionnellement. Cependant je garde en tête que chaque étape est complémentaire aux autres. La découpe est donc aussi un moment important, car apaisant.
17/ Travaillez-vous en collaboration avec d’autres artistes ?
J’ai fait beaucoup de collab’. Je fonctionne au feeling et ça part toujours de l’humain. Certaines deviennent ensuite des amis comme MG labomba avec qui j’ai fait plusieurs projets et expos. Dans la collaboration, j’aime la notion de partage. Être ensemble, passer de bons moments, c’est toujours bon enfant. Sans compter que c’est aussi l’occasion pour nous de découvrir et d’apprendre d’autres techniques.
18/ Quels sont vos sujets de prédilection en création ?
En ce moment je suis en pleine évolution. De manière générale j’aime tout ce qui est « noir », la science-fiction. J’ai fait des séries très tourmentées avec des corps déchirés, des têtes de bébés, c’est ce qui me parle le plus, le torturé et l’apocalyptique. Mais à côté de cela, j’ai ce côté doux et enfantin, un peu fou-fou et burlesque. J’ai créé un personnage il y a une vingtaine d’années : les deux dents. Ce sont des petits personnages, des arbres avec deux dents qui s’en prennent plein la tête à longueur de temps ! (Sourire) J’adore également les portraits, le regard parce que c’est le reflet de l’âme. Selon mon humeur je peux donc être très noir ou très blanc !
19/ Si je vous dis : demain au réveil, la peinture n’existe plus pour vous. Comment le vivriez-vous ?
Je crois que j’arrêterais de vivre. La peinture, c’est toute ma vie. Ce serait donc extrêmement compliqué pour moi parce que je n’imagine même pas que cela puisse arriver. Je trouverais certainement une solution en faisant des fresques avec mon sang ! (Rire)
20/ Comment imaginez-vous la suite de votre carrière ? Avez-vous des envies d’évolution, d’apprentissages de nouvelles techniques… ?
Je me remets en cause régulièrement. Je ne vis pas sur mes acquis et je suis avide de nouvelles techniques. A côté de la peinture je m’instruis beaucoup sur tout ce qui est métaphysique, astronomie… En ce qui concerne ma carrière, de quelle carrière parlez-vous ? Je me fiche de ma carrière, je n’ai pas de plan de carrière, j’aime peindre, c’est tout.
21/ Quels mouvements artistiques vous inspirent, vous fascinent ?
Le surréalisme, sans hésitation. Dali m’a donné cette envie de peindre. J’étais fasciné par son travail.
22/ Vous semblez avoir ce besoin d’être au contact avec la nature, les choses simples de la vie… pourtant cela ne se reflète pas dans votre travail.
En effet, autant mon travail reflète un côté trash, autant dans mon quotidien je suis simple et « cool », j’adore la nature. C’est la société qui m’inspire ce côté sombre. Mon quotidien, c’est mon jardin secret. Vous savez, je ne suis pas quelqu’un qui aime parler de moi. Mon travail ne reflète pas forcément ma personnalité, mais me permet d’extérioriser mes tourments et mes questionnements.
23/ Une journée avec Alain, ça ressemble à quoi ?
Tout dépend comment je me suis levé (rire).